Les dégâts de l’infantilisation des personnes âgées

Les dégâts de l'infantilisation des personnes âgées

L’infantilisation des personnes âgées est une problématique de plus en plus respectée dans les établissements de soins et maisons de retraite.

Si ce phénomène est souvent involontaire, ses effets peuvent être délétères, tant sur le bien-être psychologique des résidents que sur leur autonomie. En s’appuyant sur les travaux d’Erving Goffman et l’étude « Goffman and the Infantilization of Elderly Persons«  , cet article propose une analyse approfondie de ce comportement, de ses origines et des solutions à envisager pour les professionnels.

Qu’est-ce que l’infantilisation ?

L’infantilisation définit le fait de traiter une personne âgée comme un enfant. Cela se traduit par l’utilisation de surnoms affectueux, de langage simplifié ou de discours condescendants.

Parfois, les informations personnelles des résidents sont partagées en public, compromettant ainsi leur dignité. Ces comportements, bien que souvent motivés par des intentions bienveillantes, peuvent susciter des réactions négatives : retrait social, frustration ou opposition passive.

Une analyse sous l’angle de Goffman

Erving Goffman, sociologue réputé pour son analyse des interactions sociales, propose une approche théorique qui éclaire ce phénomène.

  • La dramaturgie sociale : Goffman compare les interactions humaines à des performances théâtrales. Dans ce cadre, les soignants adoptent des rôles influencés par des stéréotypes sur les personnes âgées, ce qui peut conduire à des comportements infantilisants.
  • Les cadres d’interprétation (Frame Analysis) : Les soignants interprètent les situations selon des cadres culturels et professionnels prédéfinis. Un cadre dominant associe souvent la vieillesse à la fragilité, favorisant ainsi les pratiques paternalistes.

Les effets négatifs de l’infantilisation

Loin de favoriser l’épanouissement des personnes âgées, l’infantilisation peut aggraver leur sentiment de dépendance. Les études ont montré que certains comportements de type « baby talk » peuvent réduire l’engagement cognitif des résidents et renforcer les symptômes de démence.

Étude de cas : Changer de cadre, changer de résultats

Dans l’étude, des soignants ont volontairement arrêté d’utiliser un langage enfantin avec les résidents d’un centre de soins.

En quelques semaines, des améliorations notables ont été enregistrées : les résidents ont vu plus d’alertes, participaient davantage aux activités et exprimaient une plus grande satisfaction générale. Cette observation souligne l’importance d’adopter une posture respectueuse et adulte dans les interactions quotidiennes.

Vers une pratique professionnelle plus respectueuse

Pour les professionnels du secteur médico-social, il est essentiel de :

  1. Sensibiliser et former les équipes : Une meilleure compréhension des effets de l’infantilisation permet de modifier les pratiques. Des ateliers sur la communication adaptés aux personnes âgées peuvent être organisés régulièrement.
  2. Favoriser l’autonomie : Encourager les résidents à prendre des décisions, même mineures, renforcer leur sentiment de contrôle et d’autonomie.
  3. Utiliser un langage valorisant : Privilégier un ton respectueux, sans diminutif ou langage simplifié, en s’adressant aux personnes âgées comme à des adultes.

Conclusion

L’infantilisation des personnes âgées constitue un biais inconscient mais largement répandu dans les établissements de soins. En adoptant des pratiques inspirées des théories de Goffman et en ajustant les comportements au quotidien, les professionnels peuvent améliorer significativement la qualité de vie des résidents, tout en renforçant leur dignité et leur autonomie.