Prévention & Seniors : le Grand Challenge des Innovations

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Parallèlement, nous voyons de plus en plus de concours organisés par des financeurs qui cherchent à identifier des innovations dans ce champ de la prévention, toujours à destination de cette population.

Même si les approches sont différentes, l’objectif reste le même : convaincre plus de seniors de s’engager dans les axes de prévention, avec souvent la conviction que l’innovation va permettre de convaincre plus de seniors.

Or, dans les différentes études que nous avons menées, qui corroborent d’autres études sur le sujet de la prévention, il est toujours aussi difficile, quel que soit l’innovation, de convaincre ces jeunes seniors d’adopter des comportements de prévention.

La difficulté des innovations

Avec le vieillissement de la population, le nombre de personnes participant aux ateliers de prévention augmentée au fur et à mesure des années. Mais si l’on considère le pourcentage de la population âgée, la situation est plus vérifiée.

D’autant que les actions de prévention sont menées sur l’aspect convivialité, ce qui attire plus de personnes. Le sujet de la prévention devient secondaire mais s’il reste important au côté de la convivialité.

Alors pourquoi les innovations ne font-elles pas vraiment bouger les lignes ?

Tout d’abord, il y a innovation et innovation. Il peut y avoir des innovations qui ne sont pas basées sur des fondamentaux et qui ne répondent pas aux besoins et aux attentes des seniors.

Un porteur de projet qui va développer des actions de prévention sur la convivialité ou sur le jeu pour convaincre plus de seniors va probablement réussir.

4 Profils de Seniors vs la Prévention

Par contre, dans d’autres cas, les innovations seront trop extrêmes pour pouvoir attirer les jeunes seniors.

Nous avons mené une étude en 2023 sur la vision et l’appétence des plus de 55 ans vis-à-vis de la prévention et nous avons trouvé 4 profils principaux :

▪️ Les Initiés, ce sont ceux qui sont déjà convaincus, par leur caractère psychologique, de l’intérêt de la prévention. Ce sont souvent des personnes qui ont fait du sport et mangé très correctement. D’ailleurs, lorsqu’on les interroge, une partie de ces personnes dit : « Mais ce n’est pas de la prévention, c’est ce que je fais depuis tout le temps. » On retrouve une grande partie de ces personnes dans les actions de prévention.

▪️ L’autre catégorie est celle des Non-conscients. Ce sont des personnes qui n’ont pas conscience de l’importance du sport ou qui ne sont pas informées sur les impacts des aliments ultra-transformés sur la santé, notamment sur le microbiote.

▪️ La troisième catégorie concerne les personnes qui vont procrastiner. Ce sont des personnes qui, psychologiquement, ont l’habitude de procrastiner, et c’est devenu un mode de vie. Ou alors, ce sont des personnes qui ont peur de découvrir des problèmes, notamment liés à la santé, et qui vont remettre à plus tard leurs tests ou leurs différents examens.

▪️ La quatrième catégorie est probablement la plus difficile à convaincre. Il s’agit des Réfractaires. Ceux qui pensent que s’engager dans des actions de prévention, c’est admettre une faiblesse, et cela va à la rencontre de leurs valeurs. En effet, ces personnes ont grandi avec l’idée qu’il fallait être fort pour être aimé.

Des réactions différentes vs de la Prévention

Qui retrouve-t-on dans les actions de prévention et dans les différents sujets de prévention ?

Une grande majorité des participants aux actions de prévention, ou des personnes qui prennent des mesures de prévention pour maintenir leur autonomie, font partie de la première catégorie : les initiés.

L’autre partie ce sont des personnes issues des trois autres catégories qui viennent prendre des mesures suite à un incident de santé. Dans différents focus groups que nous avons menés, nous avons noté des personnes qui viennent d’apprendre qu’elles sont diabétiques et qui, brusquement, vont changer fortement leur alimentation suivant les recommandations du médecin.

La première catégorie concerne ceux qui vont agir en prévention, et la deuxième concerne les personnes qui vont réagir suite à un incident.

La première catégorie va essayer de tout faire pour éviter les problèmes plus tard. La deuxième catégorie va essayer de trouver des solutions pour vivre avec les « dégâts » déjà constatés.

Le défi des innovations

Les innovations répondent à un défi important. Premièrement, aussi performante que l’innovation soit, elle a toujours du mal à convaincre les trois catégories les plus réfractaires à la prévention.

Et si ces innovations sont trop disruptives, elles ne vont pas convaincre les personnes déjà en prévention, qui appartiennent à la première catégorie.

En effet, les personnes de la première catégorie, les Initiés, sont des personnes qui se sont renseignées toute leur vie sur les éléments pour bien manger, faire du sport, protéger leur mémoire, etc. Cela a été naturel pour eux et ils ont acquis une très forte connaissance, même si parfois limitée, concernant les mesures à prendre pour prendre soin de leur santé.

D’ailleurs, jusqu’à l’âge avancé de 60 ans, ces personnes ne parlent pas de prévention, mais prennent soin de leur santé pour être en meilleure forme, par exemple.

Les personnes de cette catégorie, qui sont les plus en phase avec la prévention, arrivées à l’âge de la retraite, sont celles qui sont les mieux informées sur ces différents sujets.

Ainsi, si un industriel de l’agroalimentaire développe un produit pour ces personnes, mais que ce produit est ultra-transformé, les chances de succès sont très faibles.

Prendre en compte les Usages et Habitudes, les Envies et Besoins et les Croyances

Car ces personnes comprendront que ce produit n’est pas nécessairement bon pour la santé.

Ainsi, les innovations qui ne reposent pas sur des usages, des envies, des besoins et des croyances de cette catégorie ont très peu de chances de réussir.

Prenons un autre exemple : lorsque nous échangeons avec les personnes de cette catégorie dans les focus groups à propos de l’alimentation biologique, la très grande majorité de ces personnes répondent : « Le bio, ça n’existe pas. » Le fait d’avoir lu beaucoup d’informations par leur caractère curieux sur l’agriculture biologique, leur a fait conclure que le bio n’existait pas.

Et si on leur pose la question de savoir ce qu’il devrait faire à la place de l’agriculture biologique, ces personnes répondent souvent : « Il est préférable de communiquer sur une agriculture raisonnée. »

Ici, l’important est de se baser sur les croyances de la génération de jeunes seniors que l’on souhaite cibler. Que ces croyances soient justes ou fausses, proposer une innovation qui va à la rencontre d’une croyance ne sera pas utilisée.

Un autre exemple que nous avons testé concerne les innovations qui permettent de mesurer rapidement les risques de fragilité d’une personne.

Certaines de ces innovations fonctionnent très bien, mais communiquent sur la rapidité du diagnostic. Or, les personnes naturellement en prévention émettent des doutes sur la possibilité d’une innovation de faire un diagnostic sérieux en un temps aussi court.

On le voit, les personnes naturellement les plus en prévention, notamment chez les jeunes seniors, sont celles qui sont les plus informées et qui ont souvent des croyances très établies sur les actions à prendre par rapport à la santé. Ce sont aussi les personnes les plus difficiles à convaincre par rapport aux innovations trop disruptives.

Un exemple de discours : les habitudes et les croyances

Un autre exemple dans l’alimentation : lors d’un focus group avec des seniors de cette catégorie, je leur ai posé la question : « Connaissez-vous le régime méditerranéen ? » Tous les seniors de ce groupe ont répondu par l’affirmative et ont précisé que ce régime était bon pour la santé, même s’ils n’arrivaient pas à le définir entièrement.

À ce moment-là, je leur ai dit : « Il y a un régime qui est encore meilleur que le régime méditerranéen, c’est le régime MIND. » Et j’ai ajouté : « C’est un mixte entre le régime méditerranéen et le régime DASH, un régime développé pour protéger le cerveau. »

Dans les différents focus groups que nous avons menés, cela a été le seul moment où les seniors ont pris des notes pour pouvoir aller voir sur Internet ce dont je parlais.

Regardons de plus près la manière avec laquelle j’ai présenté l’idée : je me suis basé sur leur connaissance d’un régime, le régime méditerranéen, et sur la croyance qu’il était bon pour la santé .

Ensuite, j’ai proposé le nouveau régime qu’ils ne connaissaient pas, en l’associant au régime qu’ils connaissaient, et j’ai introduit la notion liée au cerveau.

En faisant cela, j’ai calé mon discours sur l’une des plus grandes peurs que les seniors ont : celle des maladies cognitives.

Et à ce moment-là, l’innovation de ce régime a été assez facilement acceptée.

Cependant, d’autres études scientifiques indiquent que même si on convainc les jeunes seniors d’adopter ce régime, moins de 20 à 25 % vont continuer de le suivre.

Par contre, si j’avais abordé directement le sujet du « régime MIND » sans me baser sur leurs croyances et sur un élément qu’ils connaissaient, il aurait probablement été refusé.

Pour moi, il en va de même avec les innovations dans le champ de la prévention.

Comment aller plus loin ?

  • La participation à une de nos formations
  • L’organisation d’ateliers de réflexion et de mise en pratique de cette solution
  • La réalisation de missions de conseil plus globales et complètes


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