Passer de 10 % à 20 % de taux de pénétration de la téléassistance d’ici 2030 est un souhait des téléassisteurs en France.
La faisabilité de cette ambition me fait penser à des pays comme la Suède et la Grande-Bretagne. Ils atteignent respectivement 26 % chez les Seniors de plus de 75 ans et 1,7 million d’abonnés en Grande Bretagne déjà en 2017.
Les comparaisons doivent être faites avec prudence. Il faut tenir compte des spécificités locales, comme la forte culture d’autonomie en Suède. Cet objectif de 20 % semble crédible.
Passer de 10 % à 20 % d’ici 2030 signifie cibler 20 % des boomers les plus âgés. Ils ont des valeurs et des comportements différents.
Une téléassistance en phase avec les attentes et les usages des Boomers
Cependant, il est légitime de se demander si les différences entre les boomers et les seniors sont significatives. Ces différences influencent-elles vraiment la consommation de la téléassistance ? Dans de nombreux cas, c’est un achat quasi obligatoire.
Un taux de 20 % de pénétration de la téléassistance en 2030 signifie passer d’environ 700 000 installations en 2024 à plus de 1,7 million, en tenant compte du nombre croissant de boomers.
Dans mon analyse, je pars du principe que l’on parle d’un taux de pénétration sur les mêmes tranches d’âge, c’est-à-dire les plus de 83 ans. Il ne s’agit pas d’un nombre plus important de personnes plus jeunes, ce qui ne ferait pas augmenter ce taux.
Alors, comment atteindre ce 20 % ? Voici plusieurs pistes de réflexion.
20 à 30% : proposition de solutions pour la téléassistance
La téléassistance gratuite
Offrir la téléassistance gratuitement aux personnes ayant dépassé un certain âge. Cet âge reste à définir. Un exemple existe en France. Dans la région de Toulouse, la téléassistance est proposée gratuitement par la collectivité locale, en partenariat avec Tunstall, le premier téléassisteur français. Dans cette zone, le taux d’équipement est bien plus élevé, avec plus de 25 000 personnes équipées. Cette hypothèse nécessite bien sûr un calcul de rentabilité pour les finances publiques. Une étude espagnole réalisée par Tunstall démontre cette rentabilité.
La téléassistance obligatoire
Personnellement, j’y suis opposé, mais je souhaite citer cette option. L’idée est de rendre la téléassistance obligatoire, comme on doit avoir une assurance pour son logement.
Les outils plus modernes de la téléassistance
L’idée est de constater que certaines personnes âgées ne s’équipent pas de téléassistance. Le médaillon peut être perçu comme stigmatisant. Il s’agit donc de proposer des médaillons modernes, plus design, ou d’autres solutions comme des montres. Je pense à des modèles modernes, comme ceux de Life Plus (voir la photo) ou la Samsung Watch. À mon avis, moderniser les éléments portés de la téléassistance ne suffira pas à faire passer le taux de 10 % à 20 %. D’après mes calculs réalisés il y a quelques années, cela pourrait augmenter le taux d’équipement de 10 à 15 % environ. Ce qui est déjà intéressant.
La téléassistance intégrée dans d’autres produits et services
L’idée est que la téléassistance, ou des offres similaires, soit intégrée dans des services plus globaux. On peut imaginer la téléassistance intégrée à une offre de télésurveillance, par exemple. Jusqu’à présent, cette piste a été peu développée.
La motivation des prescripteurs
Prenons l’exemple des services d’aide à domicile qui peuvent prescrire la téléassistance. Pour l’instant, la plupart de ces services proposent la téléassistance comme une option aléatoire. Un dirigeant d’un grand service d’aide à domicile m’a dit : “Je préfère que mes chefs de secteur vendent des plans d’aide plutôt que la téléassistance, où je gagne seulement 2 à 3 €.”
L’idée, que j’avais développée il y a plusieurs années, est de montrer aux services d’aide à domicile l’intérêt de prescrire la téléassistance. Une étude de Tunstall réalisée en Espagne montre qu’une personne âgée équipée de téléassistance et de l’approche de Tunstall reste à domicile plusieurs mois de plus qu’une personne non équipée.
Ce temps supplémentaire permet de réaliser un chiffre d’affaires significatif, essentiel pour les services d’aide à domicile. En modifiant la présentation de la téléassistance, on peut convaincre davantage de prescripteurs d’offrir cette solution. Si les SAAD choisissent de collaborer avec un grand opérateur, ils pourraient bénéficier d’une rémunération plus élevée, aidant ainsi à équilibrer leurs finances.
D’autres circuits de distribution
L’idée est d’imaginer d’autres acteurs, en dehors de la Silver Économie et du marché des seniors, qui pourraient distribuer ou prescrire la téléassistance. Par exemple, Arkéa Téléassistance commercialise ses offres via le réseau d’agences bancaires Arkéa.
Proposer des innovations
Proposer des innovations permettrait probablement de répondre plus efficacement aux besoins et attentes des seniors. Elles apporteraient également une plus grande sécurité. Cependant, jusqu’à présent, les efforts collectifs et cumulés des acteurs pour innover n’ont pas vraiment fait évoluer le taux d’équipement. Par contre, ces innovations permettent à certains acteurs de se différencier.
Une campagne de communication régulière
Dans cette solution, le terme « régulier » est crucial. Dans le secteur des monte-escaliers, les seniors connaissent bien la marque Stannah. Cette reconnaissance vient d’une communication régulière dans les médias comme la télévision.
La mémorisation est essentielle pour les téléassisteurs, tout comme pour les acteurs de la Silver économie. Il est crucial d’être présent au bon moment. Une personne en juin peut ne pas être intéressée par une assistance, mais en juillet, elle peut en avoir besoin rapidement. Il faut donc être présent dans son parcours décisionnel.
Cela implique une visibilité régulière à la télévision. Certes, cela a un coût. Vous pourriez dire que les monte-escaliers ont des marges plus importantes que la téléassistance. Je pourrais citer la marque Epitact, dont les marges sont plus faibles, mais qui communique régulièrement à la télévision pour seniors. Cette stratégie doit être calculée pour envisager le retour sur investissement. Mon confrère Benoît Goblot, qui dirige l’agence Matinal, est un expert dans ce domaine.
Permettre à plus de personnes d’avoir la téléassistance
J’aime expliquer que le marché de la Silver économie se situe à l’intersection entre ceux qui veulent acheter et ceux qui le peuvent. Cela semble évident, mais cela clarifie ma vision du marché de la téléassistance. Il s’agit ici de toutes les idées permettant à des personnes ne pouvant pas accéder à la téléassistance, pour diverses raisons, de s’équiper de ce service. Les idées sont nombreuses, surtout lors de séances de brainstorming.
Permettre à plus de seniors d’accepter la téléassistance
J’avoue que cette option est un peu mon dada. J’ai d’ailleurs créé la méthodologie “Senior Strategic”. Il s’agit de conserver les services existants et d’agir sur deux axes. Tout d’abord, optimiser les campagnes de communication avec des outils issus de la psychologie sociale et cognitive. Ensuite, élargir le ciblage pour atteindre des seniors qui refusent la téléassistance.
Je me souviens d’une discussion avec une personne ayant toutes les caractéristiques pour s’équiper. À 85 ans, il refuse toujours la téléassistance, malgré la connaissance des risques. Sa psychologie joue un rôle. L’une de ses valeurs principales est la réussite sociale, avec la croyance que sans réussite, on n’est pas aimé. Environ 20 % des personnes partagent ce profil psychologique. Elles perçoivent la téléassistance comme un signe d’échec social et craignent de ne pas être aimées.
Utilisation d’Outils Psychographiques
Ce type de personne est très difficile à convaincre avant un incident. Après un incident, la peur d’un aggravement de la situation ou celle de mourir devient plus forte que la peur de ne pas être aimé. En revanche, d’autres personnes valorisent la santé et la vie, avec des croyances moins rigides. Elles sont plus faciles à convaincre avec les bons arguments.
Il est donc essentiel de développer des campagnes de communication basées sur des critères psychographiques. Cela permettra de cibler les seniors déjà convaincus de la téléassistance, ainsi que ceux qui refusent à cause d’un blocage psychologique. Une autre solution consiste à cibler certains profils particuliers de seniors, comme les Seniors Initiés.
Je détaille davantage cette méthode “Senior Strategic” dans ce document.
Évidemment, d’autres solutions existent pour faire passer le taux d’équipement de 10 % à 20 %. Il s’agira d’une addition de plusieurs stratégies différentes pour réaliser cet important gap. Passer de 10 % à 20 % entre 2024 et 2030 ne signifie pas simplement doubler le nombre de personnes équipées. Cela implique de faire bien plus que doubler, surtout avec le nombre croissant de baby-boomers qui atteindront l’âge de la téléassistance dans quelques années.
Comment aller plus loin sur les Seniors ?
- La participation à une de nos formations, soit en inter-entreprise, soit conçue spécialement pour votre entreprise.
- L’organisation d’ateliers de réflexion et de mise en pratique de cette solution pour votre produit ou service de la Silver économie.
- La réalisation de missions de conseil plus globales et complètes pour appliquer cette méthodologie à vos produits de la Silver économie.
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